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Les missiles sol-air portables russes Strela et Igla,
des tueurs largements répandus

20 juillet 2003


Missiles IglaT

outes les tentatives récentes d'abattre des avions civils ou militaires autour des aérodromes, en Irak, dans la péninsule arabique ou en Afrique, ont impliqué des missiles sol-air de conception russe. Il est temps de s'intéresser de près à leurs capacités.

Dans les conflits locaux qui embrasent le monde aujourd'hui, les systèmes de défense aérienne portables sont devenus une menace majeure pour la puissance aérienne. Simples, peu coûteux, efficaces, faciles à employer et impossibles à neutraliser, les missiles portables sont idéaux pour les "Etats-voyous" et les organisations terroristes.



«... Ce sont les forces russes qui subissent aujourd'hui la menace de l'Igla : dans le deuxième semestre de 2002, les rebelles tchétchènes ont abattu au moins 6 hélicoptères. »


L'Union Soviétique a créé des systèmes portables de plus en plus efficaces – et disponibles. Les Strela-2 (SA-7) et 3 (SA-14), Igla-1 (SA-16) et Igla (SA-18) sont bien plus faciles à acquérir que les modèles occidentaux, alors que l'Igla a les mêmes capacités que le Stinger américain. Et l'Igla-S russe – ou Super Igla – en cours de développement est une arme vraiment mortelle.



Les débuts de la gamme

En 1958, le renseignement soviétique annonça que les Etats-Unis avaient commencé à travailler sur un système de défense aérienne simple et léger, qui pouvait être utilisé par un seul soldat. Ce système, qui fut connu plus tard sous le nom de Redeye, était basé sur un dispositif de guidage infrarouge miniaturisé permettant de se diriger sur la chaleur de l'avion sans interférence du lanceur. La nouvelle amena le Conseil des Ministres de l'URSS à prendre en été 1960 la décision de développer et de mettre en service un système similaire. En fait, deux systèmes de défense aérienne furent autorisés : le Strela-1 autopropulsé de niveau régimentaire, et le Strela-2 portable de niveau bataillonnaire (Strela est le mot russe pour flèche). Ce dernier, connu sous la désignation 9K32, avait été conçu par le bureau d'ingénieurs CKB GKOT à Kolomna près de Moscou, qui sera bientôt renommé KBM Kolomna.

Le travail des concepteurs a été grandement simplifié par le fait que les services de renseignements soviétiques avaient livré une description technique détaillée du Redeye. Même si le Strela-2 n'était pas une copie du système américain, certaines solutions techniques ainsi que le concept général avaient une dette envers le Redeye. Le dispositif de guidage infrarouge avait été conçu par le bureau OKB-357 de Leningrad. La tête chercheuse s'appuyait sur des développements atteints précédemment dans le design des missiles air-air K-13 (AA-2) et K8MT (AA-3).

Les plus grandes difficultés rencontrées se produisirent lors de la conception de la petite et légère plate-forme gyroscopique. Finalement, la solution originale américaine fut copiée. Elle consistait à placer un miroir infrarouge parabolique sur un cardan qui était stabilisé par un petit gyroscope avec trois degrés de liberté. L'assemblage ne nécessitait aucune plate-forme gyroscopique séparée, comme c'était souvent le cas sur les missiles air-air, et contribuait à limiter le poids du dispositif de guidage infrarouge à seulement 1,2 kg.

Le missile 9M32 du système 9K32 Strela-2 (dans la nomenclature soviétique et russe, "M" désigne généralement le missile et "K" le système complet) avait un diamètre de 72 mm. Il pesait 9,15 kg, alors que le système entier pesait 14,5 kg dans le tube de lancement. Le container consommable était nommé 9P54, et un missile chargé avait une durée de vie en stock de 10 ans. Il était attaché au mécanisme de lancement à poignée amovible 9P53, qui comprenait un bloc électronique, un déclencheur mécanique, une batterie et quelques autres équipements.

Un moteur-fusée utilisant un carburant solide à combustion rapide accélérait le missile jusqu'à une vitesse de 430 à 450 m/s. Il était contrôlé par de petites surfaces de contrôles repliées à l'avant et déployées lorsque le missile quittait le lanceur. Chaque ailette individuelle ne se déplaçait que dans une direction, de sorte que pour exécuter un virage, le missile faisait une rotation pour atteindre la position appropriée afin de faire fonctionner les surfaces de contrôle. Une méthode de navigation proportionnelle était utilisée pour contrôler le missile.

La petite charge explosive de 1,17 kg ne pouvait détruire une cible que par impact direct. Toutefois, comme le système était conçu pour une attaque en poursuite, le point d'impact le plus probable était le moteur de l'avion – son talon d'Achille. Par conséquent, une si petite charge était considérée comme suffisante. Comme cela fut révélé plus tard, les concepteurs avaient tort. D'autres facteurs limitaient l'efficacité au combat du Strela-2. Il ne pouvait engager une cible que si elle volait à une altitude entre 50 et 1500 m, à une vitesse inférieure à 220 m/s (790 km/h) en ne manœuvrant pas au-delà de 3,5 g. Mais ce n'était qu'un début.



Concepts et engagements initiaux

Après avoir détecté une cible, l'opérateur du Strela-2 mettait le système en position de tir – sur son épaule – et le mettait sous tension. La temps de réaction du système à l'allumage était d'environ 5 secondes. Puis l'opérateur dirigeait le lanceur sur la cible afin que la tête chercheuse du missile puisse l'acquérir, ce qui déclenchait un signal sonore et lumineux pour informer le soldat. Ce dernier pressait la détente à mi-position, permettant au gyroscope de mesurer les données du suivi.

Lorsque le missile était prêt au tir, un autre signal sonore et lumineux était émis. L'opérateur pressait ensuite la détente complètement, et le missile se séparait du lanceur, éjecté à une distance de sécurité par une charge spéciale. Une fois que le missile avait atteint une vitesse de 30 m/s, le propulseur était automatiquement allumé et la charge explosive était armée. En vol, le missile effectuait 900 rotations par minute. Un détonateur à impact mettait à feu la charge ; et si le missile manquait la cible, il s'autodétruisait après 11 à 14 secondes.

Un équipe de feu Strela-2 se composait d'un opérateur et de deux assistants. Ils portaient au total cinq containers 9P54 avec leurs missiles et un seul mécanisme de lancement à poignée amovible 9P53. Ils avaient également quelques batteries de rechange, car chacune n'avait assez d'énergie que pour 30 à 40 secondes, ce qui parfois n'était pas suffisant pour une seule séquence d'engagement ! Avec le temps, les équipes reçurent une radio légère pour qu'elles soient informées des cibles en approche par le chef DCA du régiment.

Pour l'emploi tactique dans des conflits à grande échelle, l'arme devait remplir un double rôle. Avant tout, chaque unité de tête au niveau bataillonnaire avait une section de systèmes Strela-2. Bien que les zones d'engagement du système ne se recouvrent pas dans le cas d'avions rapides, il y avait de grande chances qu'un strike package ennemi soit combattu et subisse certaines pertes. Ceci s'ajoutait à la menace multicouche qui était fermement établie par des systèmes de missiles à longue portée. Dans les secteurs arrières, tout les sites et objets importants avaient leurs propres défenses à courte portée, consistant en groupes ou sections Strela-2. Parmi de tels objets se trouvaient des postes de commandement, des sites de missiles air-sol, des postes radars, des franchissements de cours d'eau, des installations logistiques majeures, etc.

Ces systèmes avaient l'autorisation de tirer seulement en cas de menace directe sur les installations protégées. Les systèmes portables n'étaient pas capables de protéger les objets eux-mêmes, et d'ailleurs pas conçus pour cela, mais ils amélioraient l'efficacité globale des défenses aériennes d'ensemble en infligeant des pertes à l'ennemi. Celles-ci devenaient plus dangereuses lorsque seules quelques passes d'attaques étaient menées. Dans de tels cas, le strike package pouvait souffrir des pertes inacceptables.

Les tirs de missiles expérimentaux – et non guidés – commencèrent à la fin de 1962, alors que les tirs avec guidages de missiles de série débutèrent à la fin de 1965. Sur les 125 tirs guidés menés jusqu'en mai 1966, 33 furent des échecs, dont 90% dus à des défauts du guidage infrarouge. Ce n'est qu'en janvier 1968 que le système 9K32 fut officiellement accepté pour le service. La production en série débuta immédiatement à l'usine VA Degtaryev de Kovrov, alors que les poignées amovibles étaient produits par l'usine mécanique Izhevsk. La même usine de production reste en fonction aujourd'hui. Le Strela-2 apparut trop tard pour être engagé dans la Guerre des Six-Jours en 1967, bien que le Strela-2 fut livré au Vietnam, où il fut utilisé au combat au début de 1968.



Deux systèmes améliorés

Les premières expériences de combat prouvèrent rapidement que le système était très loin d'être idéal. Même dans l'enveloppe strictement limitée de l'engagement, la probabilité de toucher était basse (19% à 25%). De plus, il apparut qu'un touché ne signifiait pas nécessairement une destruction. A plusieurs reprises, un appareil touché par un Strela-2 était endommagé mais parvenait à regagner sa base puis, après réparations, retournait au combat. Pour corriger ces lacunes sérieuses, le Soviet MC décida en septembre 1968 le développement de deux systèmes améliorés : un modèle intermédiaire nommé 9K32M Strela-2M et un modèle largement amélioré nommé 9K34 Strela-3. Le 9K32M a été développé très rapidement, et ses essais ont été menés entre octobre 1969 et février 1970. Au milieu de 1970, il fut accepté pour le service et remplaça immédiatement le 9K32 sur les chaînes de production.

Le missile 9M32M avait un système de guidage modernisé qui ajoutait la capacité d'engager des cibles de front, mais seulement lorsqu'elles se déplaçaient à moins de 150 m/s (540 km/h). Pratiquement, seuls des avions de transport lents et des hélicoptères pouvaient être attaqués frontalement. De plus, la performance des engagements en poursuite fut améliorée de sorte que la cible pouvait voler jusqu'à 260 m/s (940 km/h). La distance d'engagement fut accrue jusqu'à 4,2 km, et les limites d'altitude furent étendues de 50 à 2300 mètres, mais uniquement pour des cibles lentes ; la plafond n'était que de 1500 m pour les avions rapides. Le Strela-2M était plus sensible, avec une discrimination du bruit et une sélection de cible mobile pour améliorer la résistance contre les leurres.

Le mécanisme de lancement à poignée amovible fut modernisé pour la version 9P58. Bien qu'il était bien plus automatisé, simplifiant la séquence d'engagement, il était également incompatible avec les anciens tubes de missiles. Rapidement, le Strela-2M devint la version de production standard, et il a été largement exporté à plusieurs pays en grand nombre. Les clients à l'exportation pour les Strela-2 et Strela-2M ont inclus l'Afghanistan, l'Algérie, l'Angola, le Botswana, le Bénin, la Bulgarie, le Burkina-Faso, Cuba, Chypre, la Tchécoslovaquie, l'Egypte, l'Ethiopie, la Finlande, l'Allemagne de l'Est, le Ghana, la Guinée-Bissau, la Hongrie, l'Inde, l'Iran, l'Irak, le Koweït, le Laos, la Libye, la Mauritanie, le Maros, le Mozambique, le Nicaragua, la Corée du Nord, le Pérou, la Pologne, la Sierra Leone, la Somalie, le Soudan, la Syrie, la Tanzanie, le Nord-Vietnam, la Yougoslavie, la Zambie et le Zimbabwe. En fait, le Strela-2M était bien plus populaire que le Strela-3 qui lui succéda, et fut rapidement remplacé par le système portable de deuxième génération, l'Igla.

Le système 9K34 Strela-3 subit des essais entre novembre 1972 et mai 1973, et entra officiellement en service en janvier 1974. Un nouveau missile, le 9M36, fut introduit avec le système, scellé dans le container de lancement 9P59. Le missile reçut un senseur infrarouge complètement nouveau avec un dispositif de refroidissement efficace, doublant ainsi sa sensibilité. Le nouveau capteur fonctionnait sur un longueur d'onde de 3 à 5 µm, contre 2 à 3 µm pour le système précédent. Ce capteur et son système de refroidissement étaient plus lourds, et augmentaient le poids total du missile de 9,15 à 10,3 kg. La vitesse du missile décrut de 430 à 400 m/s, et la portée maximale était également légèrement inférieure à 4,1 km (2,5 km pour les engagements frontaux). Mais en raison du capteur plus sensible, la vitesse de la cible pouvait être de 260 m/s pour les cibles en approche et 310 m/s (1115 km/h) pour les engagements en poursuite. Ceci permettait au Strela-3 d'engager des avions à réaction en mode frontal. De même, les limites d'altitude étaient élargies de 30 à 3000 m.

Pour accroître la létalité du missile, une nouvelle charge explosive de 1,8 kg fut introduite. Comme les Strela-2 et –2M, elle avait seulement un détonateur à impact. Le mécanisme de lancement à poignée amovible modernisé 9P58M avait un système automatique qui bloquait le lancement lorsque la cible était en-dehors de l'enveloppe calculée. Le système avait également une meilleure batterie, qui pouvait fonctionner pendant 1 minute et demie. Le mécanisme de lancement avait un réservoir de refroidissement prenant le forme caractéristique d'une balle, par opposition au réservoir plus cylindrique de la série Strela-2.

Comme cela fut révélé durant les essais, le nouveau missile avait de meilleures capacités tous temps et même nocturnes. La probabilité de destruction s'accrut de 25% (du Strela-2M) à 32%, alors que la résistance aux contre-mesures, à la neige et à la pluie fut accrue – tout ayant une simplicité d'utilisation supérieure. Malgré ses qualités, le Strela-3 ne reçut pas l'agrément largement répandu du Strela-2M. La raison en était que de nombreux pays avaient déjà comblé leurs besoins en systèmes portables, et les améliorations trouvées sur le Strela-3 ne justifiaient pas l'achat de ce système de remplacement.



Une injection létale

Même avant que le Strela-3 n'entre en service, il a été prouvé qu'un système bien plus performant était nécessaire pour répondre à la menace croissante posée par des avions tactiques toujours plus manœuvrables et équipés de leurres infrarouges. Le fait que de nombreux nouveaux jets avaient deux réacteurs les rendait même plus résistants. De sorte que le système Strela-3 "ultime" est en fait devenu lui-même une solution "intérimaire".

La grande amélioration dans l'efficacité au combat a été largement rendue possible par les progrès dans l'électronique et les moteurs-fusées légers à carburant solide. De tels progrès technologiques ont permis aux concepteurs de systèmes portables de répondre à des besoins tactiques accrus, fournissant ainsi aux troupes des capacités entièrement nouvelles. Premièrement, l'enveloppe d'engagement accrue a permis des missiles superposant leurs zones d'engagement entre les bataillons déployés, ajoutant ainsi une couche entrelacée au réseau existant de défense aérienne.

Il n'y avait aucune route que les strike package ennemis pouvaient emprunter en direction des troupes soviétiques – au moins dans l'axe principal des opérations – sans être engagés par des systèmes portables. L'autre avantage tactique, particulièrement important pour la défense ponctuelle d'objets et de sites, était le fait que des avions à l'attaque pouvaient être engagés dans l'approche de la cible, avec de pouvoir la frapper.

L'amélioration générationnelle des caractéristiques existantes était d'une importance égale. En premier lieu, la nouvelle tête chercheuse était bien plus résistante au brouillage provenant de contre-mesures électroniques et de sources naturelles. La probabilité de destruction a également été radicalement accrue. Et comme résultat de l'expérience de combat, un système d'identification ami/ennemi a été introduit pour éliminer les tirs fratricides. Une grande emphase a été mise sur l'efficacité contre des hélicoptères en vol à basse altitude, depuis que les hélicoptères de combat sont devenus l'une des principales menaces pour les forces terrestres soviétiques.

Selon une décision du Conseil des ministres soviétiques prise en février 1971, le nouveau système a été nommé 9K38 Igla (aiguille) et devait utiliser le missile 9M39 tout neuf avec un capteur, une ogive, un moteur fusée et une section de contrôle/guidage nouveaux. Le développement du système a été entrepris par KBM Kolomna, alors que le détecteur était mis au point par LOMO MOP à Léningrad.

La seule manière d'engager une cible approchant rapidement avec un système portable exigeait que l'unité de feu reçoive une alerte préalable quant à ses données de base – direction, vitesse et altitude. L'avertissement vocal, fourni par l'échelon régimentaire sur la radio, était souvent trop rare et trop tardif pour être utile. Par conséquent, un système C2 portable léger fut développé séparément pour augmenter l'efficacité au combat. Ce système, appelé 1L15-1, devait fournir des informations aériennes dans une zone de 25x25 km. Prenant la forme de données analogiques à partir du poste C2 de défense aérienne régimentaire PU-12, les informations étaient passées via une radio R-147.

La tâche de développer de tels systèmes était toutefois trop ambitieuse pour l'époque, et en 1978 le système – qui était initialement prévu pour des essais à la fin 1973 – était toujours loin d'être prêt. En fait, tous les éléments ont été développés en 1978 à l'exception d'un seul : la tête chercheuse. A la lumière de ceci, le Conseil des ministres soviétiques a ordonné le développement d'un système intérimaire – nommé Igla-1 – en mai 1978. Ce devait être un hybride du nouveau missile et de l'équipement associé avec le capteur existant d'un missile Strela-3. Le système, appelé 9K310, devait utiliser le missile "intérimaire" 9M313 scellé dans un container composite 9P322. Le nouveau mécanisme de lancement à poignée amovible a été désigné 9P519 et intégré avec le système d'identification ami/ennemi 1L14.



Une solution intérimaire

Le système Igla-1 a passé ses tests et fut accepté pour le service en mars 1981. La production a débuté à l'Usine Kovrovskoy, alors que la poignée amovible et le système 1L15-1 C2 étaient produits par l'usine mécanique Izhevskiy. Contrairement à une croyance répandue, le détecteur Igla-1 n'était pas identique à celui utilisé dans le Strela-3 : il avait un sous-système de guidage qui dirigeait le missile plus précisément vers le point d'interception calculé, plutôt qu'utiliser la méthode de navigation proportionnelle "typique". Cependant, ceci demandait des algorithmes différents pour les engagements de face et en poursuite. Deux ensembles logiciels séparés ont été installés, et l'opérateur avait un levier de sélection avant / arrière.

De même, un appareil aérodynamique spécial a été ajouté à l'extérieur du détecteur pour diminuer le frottement et améliorer le refroidissement en réduisant la chaleur aérodynamique. En fait, le nom Igla était dérivé de cet appareil. Les missiles Igla-1 et Igla utilisent tous deux de tels appareils aérodynamiques, et leur différence est la manière la plus évidente de distinguer l'un de l'autre. L'Igla peut être identifié par sa pointe aérodynamique depuis la ligne centrale du dôme du capteur, alors que le missile Igla-1 a un cône monté sur trépied pour accomplir le même effet.

Il y avait également des changements dans la charge explosive. Malgré un poids de 1,27 kg, elle avait une puissance explosive supérieure et projetait des éclats plus grands et plus nombreux. De plus, le détonateur mettait à feu le carburant du moteur (de 0,6 à 1,5 kg) en même temps que la charge pour accroître l'effet de l'explosion. Un détonateur de proximité avait également été ajouté à celui par impact. Les contrôles aérodynamiques avaient été améliorés, et les ailettes se déployaient contre le flanc du missile plutôt qu'utiliser des ressorts à l'intérieur, afin de laisser davantage de place dans le missile.

Un nouveau moteur fusée donnait à ce dernier une vitesse de 570 m/s, bien plus que celle du Strela-2/3. Généralement, la zone d'engagement a été accrue en comparaison des systèmes précédents. La portée maximale de l'Igla-1 était de 5,2 km lors d'engagements en poursuite et de 3 km de front. L'altitude de la cible pouvait varier entre 10 et 2500 m. La limite de vitesse de la cible était de 320 m/s de face et 360 m/s d'arrière.

Comme le Strela-2M, l'Igla-1 devait être une solution intérimaire, mais il a été produit plus longtemps et est resté en production même après l'introduction de l'Igla "ultime". L'Igla-1 faisait office de variante dégradée pour l'exportation du système et, en tant que telle, a été livrée à de nombreux clients qui n'avaient pas été autorisés à recevoir l'Igla. La version d'exportation typique est appelée Igla-1E. Elle utilisait un système IFF ancien, mais le plus moderne pouvait également être installée pour certains clients sélectionnés. La version d'exportation Igla-1M n'avait aucun IFF. Selon certaines sources, les versions d'exportations n'avaient également pas de dispositif de détonation de carburant. Parmi les clients de l'Igla-1E figuraient l'Angola, la Bulgarie, la Croatie, Cuba, la Tchécoslovaquie (le système est à présent utilisé aussi bien par la République tchèque et par la Slovaquie), la Finlande (connue sous le nom de "type 86"), la Hongrie, l'Irak, la Corée du Nord, le Pérou, la Pologne, l'Arabie Saoudite, la Syrie, la Yougoslavie et les Emirats Arabes Unis.  

L'Irak a utilisé avec succès des Igla-1 durant l'opération "Desert Storm" en 1991, où ils ont permis d'abattre un AC-130H le 31 janvier, un F-16 et un hélicoptère UH-60 le 27 février ; selon des sources russes, quatre des cinq AV-8B Harriers perdus le 28 janvier et 9, 23, 25 et 27 février ainsi qu'au moins un Tornado abattu le 18 janvier l'ont également été par des Igla-1. Il est possible que d'autres appareils perdus en opérations aient la même cause. La dernière destruction connue par Igla en-dehors de la Russie était un F-16C Block 40 américain, abattu le 2 mai 1999 au-dessus du Kosovo. Il reste un doute sur la version utilisée dans cet engagement – Igla ou Igla-1. Cependant, il vaut la peine de noter que le F-16 s'est écrasé malgré son pod de contre-mesures AN/ALE-40. 



Un système effroyablement efficace

Finalement, tous les problèmes furent résolus, et le système 9K38 Igla fut officiellement admis pour le service en septembre 1983. Avec ce système fut également introduit la version finale de la tête chercheuse infrarouge. C'était en fait un capteur à deux modes, infrarouge et ultraviolet, pour accroître la résistance du système aux contre-mesures électroniques. Le nouveau capteur analysait les signaux par impulsions plutôt que dans un mode continu, ce qui a permis l'introduction du traitement avancé des signaux. De plus, les éléments photos placés autour du cardan principal permettent au capteur de détecter des émissions IR proches de la cible et de les analyser. Toutes les nouvelles caractéristiques visaient à contrer le brouilleur IR actif AN/ALQ-144 américain et des leurres de grand calibre. Le champ de vision de 80 degrés du capteur facilitait l'acquisition de la cible.

Le missile avec le nouveau capteur est nommé 9M39, et est scellé dans le tube de lancement composite en fibre de verre 9P39. Il est utilisé en conjonction avec le même mécanisme de lancement à poignée amovible 9P519 que l'Igla-1, lui permettant de tirer les missiles 9M39 Igla ou 9M313 Igla-1. Le temps de réaction est de 5 secondes seulement, alors que le temps de rechargement est de 13 secondes. L'Igla est un système extrêmement efficace. Le capteur a une grande résistance aux contre-mesures électroniques et des capacités de discrimination du brouillage naturel. Les seules lacunes sont ses caractéristiques en altitude. L'altitude maximale pour l'interception de la cible est de 3500 m. Cependant, ce chiffre se réfère aux cibles lentes. Pour des cibles rapides, dont la vitesse dépasse 250 m/s, l'altitude d'engagement maximale se limite à 1500 m de front et à 1800 m en poursuite. Mais la performance est similaire au Stinger américain.

La Russie a récemment achevé des essais d'une nouvelle version, appelée officiellement Igla-S. Elle a été développée par KBM Mashynostroeniya à Moscou. La caractéristique la plus intéressante de la nouvelle variante est l'usage d'un missile nettement amélioré, nommé 9M342, qui possède une électronique entièrement digitale de premier ordre. Comme les nouveaux éléments d'électronique sont plus légers, il a été possible d'introduire une charge explosive plus grande, de 2,5 kg, avec des tiges métalliques pour accroître la létalité, ainsi qu'un détonateur équipé d'un télémètre laser. Le détonateur met à feu la charge à une distance de 5 mètres en-dessous de la cible, et l'énergie de l'explosion ainsi que les tiges sont dirigés vers la cible. Comme dans le modèle précédent, le carburant restant est également mis à feu pour augmenter la puissance de destruction.

L'électronique digitale permet l'usage d'une méthode de navigation proportionnelle plus moderne que le guidage visuel, ce qui améliore grandement la probabilité de toucher, particulièrement contre des cibles agiles et manœuvrantes. La portée de l'Igla-S a été augmentée à 6000 m, et s'approche donc de celle des premiers systèmes à courte portée comme le Roland 2. En même temps, l'Igla-S est mis en vente avec les systèmes de vision nocturne et C2 9S520, permettant non seulement les opérations de nuit, mais aussi l'intégration des Iglas à des systèmes C4I, comme le 9S80 Sborka, le 9S737 Ranzhir, et le 9S482 plus ancien.

L'exportations des systèmes Igla-S a été très limitée. Les clients connus comprennent le Brésil, la Yougoslavie, et récemment l'Inde. Ils sont également utilisés par plusieurs anciennes républiques soviétiques, dont notamment l'Ukraine, la Belarus et le Kazakhstan.

L'Igla est maintenant le système de DCA portable standard de l'armée russe. Chaque bataillon de mêlée a une section Igla avec trois groupes. Une section Igla est équipée de véhicules de combat d'infanterie BMP-2 ou BMP-3, de transporteurs de troupes blindés BTR-80, ou de camions tout terrain légers. Au niveau régimentaire et plus haut, un groupe de systèmes Igla est intégré à chaque batterie de défense antiaérienne et à chaque poste radar. Les postes de commandement sont habituellement défendus par des batteries de missiles mobiles, chacune ayant son propre groupe d'Igla. Dans une telle organisation, la densité des Igla dans les forces terrestres est très haute.

De plus, l'Igla n'est pas seulement une arme d'opportunité. Les groupes étant équipés d'un panneau d'affichage spécial 1L110, qui ressemble à un ordinateur portable de terrain, et d'une connexion à des systèmes de défense aérienne terrestres intégrés, les engagements des unités de feu Igla peuvent être planifiés à un niveau supérieur de commandement et peuvent être combinés à des engagements d'autres éléments de défense antiaérienne. Il se pourrait donc qu'un groupe d'appareils ennemis manœuvrant pour éviter des tirs de DCA soient poussés au-dessus d'un tapis mortel d'aiguilles, avec des opérateurs informés et prêts.

Mais la menace la plus grande et la plus réelle que l'Igla présente aujourd'hui, ce sont les forces russes qui la subissent. Dans le deuxième semestre de 2002, les rebelles tchétchènes ont abattu au moins six hélicoptères russes : un Mi-26 le 19 août, deux Mi-24 le 31 août et le 26 septembre, et trois Mi-8 les 17 et 29 octobre, ainsi que le 3 novembre. Bien que la cause de chaque cas n'ait pas été confirmée, on suspecte que la plupart des hélicoptères ont été les victimes d'Igla. Les hélicoptères russes Mi-8 et Mi-24 sont généralement équipés de systèmes de suppression d'échappement pour réduire leur signature IR, des brouilleurs IR actifs L-144, et des émetteurs de flares de 26mm ASO-2V. Mais même toutes ces contre-mesures ensemble sont incapables de neutraliser l'Igla.




Michal Fiszer et Jerzy Gruszczynski, "On Arrows and Needles", Journal of Electronic Defense, December 2002    
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat
    







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