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Le danger des "bombes sales" est exacerbé par de vieux générateurs soviétiques

10 juillet 2002


Générateur nucléaire américainL

a récente découverte de générateurs radio-actifs abandonnés dans une forêt géorgienne a suscité l'inquiétude que des équipements similaires, dispersés à travers l'ex-Union soviétique, puissent attirer l'attention de terroristes recherchant des matérieux nucléaires pour construire une bombe rudimentaire mais hautement dangereuse.

On considère que l'ex-Union soviétique a manufacturé quelque 1000 générateurs radiothermiques, contenant du strontium-90 ou du plutonium-238 radio-actifs, pour fournir du courant aux phares et aux équiments de communications dans des endroits éloignés de l'Arctique à la Mer Noire. Beaucoup sont maintenant à l'abandon et sans surveillance.

Aussi terribles que les attaques terroristes de septembre dernier sur New York puissent apparaître – détruisant le World Trade Centre en même temps que les vies de milliers d'innocents –, il y a un scénario qui hante encore davantage les experts en sécurité et les politiques : le spectre de terroristes dispersant des particules radio-actives, en utilisant ce qui est connu comme une "bombe sale".

Une "bombe sale" est une arme primitive – un explosif conventionnel attaché à un petit conteneur de plutonium ou d'uranium n'ayant pas besoin d'être raffiné jusqu'à la qualité d'une arme nucléaire. Lorsqu'elle explose, des radiations très puissantes sont dispersées sur une assez petite surface. Mais petit est un concept relatif – dans une métropole très dense comme New York, cela pourrait signifier la moitié de l'île de Manhattan, le cœur financier et culturel de la cité.

«... L'essentiel des immeubles resteraient sur pieds, mais la zone contaminée deviendrait inhabitable pour des décennies. Le coût économique serait incalculable. »
«... L'essentiel des immeubles resteraient sur pieds, mais la zone contaminée deviendrait inhabitable pour des décennies. Le coût économique serait incalculable. »

Arjun Makhijani, président de l'Institut pour l'Energie et le Recherche Environnementale basé aux Etats-Unis, est un expert des carburants nucléaires. "Vous pouvez la considérer comme une arme chimique dont les matériaux toxiques dispersés peuvent entraîner maladies, cancers, évacuation, pertes économiques, risque accru de maladies et, avec de hautes doses de radiations, également des dommages plus immédiats à la santé. Il ne s'agit pas d'armes nucléaires qui réduiraient en décombres de vastes zones."

L'essentiel des immeubles resteraient sur pieds, mais la zone contaminée deviendrait inhabitable pour des décennies. La plupart des gens exposés aux radiations finiraient par mourir d'un cancer. Le coût économique serait incalculable.


Les générateurs orphelins

Changement de décor dans une lointaine forêt de la république caucasienne de Géorgie, où deux cylindres contenant du strontium-90 hautement radio-actif ont été découverts par trois bücherons à la fin de l'an dernier. Les cylindres étaient tellement radio-actifs, en fait, qu'ils avaient fait fondre la neige environnante. Les bücherons ont subi des brûlures de radiation, et des experts de l'Agence Internation de l'Energie Atomique (AIEA) à Vienne ont été appelés pour prendre possession des objets.

Le lien entre le scénario hypothétique d'un désastre à New York et les événements réels en Géorgie a alerté les experts. Cette fois, les scientifiques ont été en mesure d'atteindre les cylindres radio-actifs et de s'en emparer, mais qu'en sera-t-il la prochaine fois, si des terroristes et non des bûcherons les découvrent ?

Plusieurs pays ont construit des générateurs radio-actifs, connus sous le nom de générateurs radiothermiques, qui utilisent du strontium-90 ou du plutonium-238. Ces appareils sont très efficaces, compacts et peuvent fonctionner pendant de nombreuses années. Les Etats-Unis les utilisent par exemple pour alimenter certains satellites envoyés dans l'espace. Mais l'ex-Union soviétique a été la seule nation à produire en masse les générateurs et à les utiliser pour l'alimentation de phares ou de tours de communications lointaines. Après l'éclatement de l'URSS en 1991, de nombreuses installations ont été abandonnées. Les générateurs, avec leurs casiers protecteurs en métal, devinrent des cibles pour les voleurs de métaux usagés.

Melissa Fleming, porte-parole de l'AIEA, explique que "ce qui est unique dans le cas présent, c'est le nombre produit – nous pensons qu'il y en a eu plus de 1000 – et l'héritage de l'ex-Union soviétique. Malheureusement, les contrôles de maintenance ont été interrompus et les informations quant à l'emplacement de ces sources, et aux moyens de les protéger, n'étaient simplement pas disponibles au niveau national dans les nouveaux Etats. Nous avons ainsi des cas où ces sources sont apparues sur d'anciennes bases militaires ou, comme dans le dernier cas en Géorgie, gisent dans une zone lointaine – probablement le résultat d'un incident où quelqu'un ayant volé les boucliers protecteurs se sera débarassé du reste."

Fleming reconnaît que l'AIEA n'a aucune idée de l'endroit où la plupart de ces batteries nucléaires radio-actives se trouvent actuellement, sur le territoire de l'ex-Union soviétique. "Nous recherchons la coopération des autorités russes pour identifier l'emplacement possible de ces sources, et elles ont été très coopératives. L'un des problèmes reste que plusieurs des emplacements ont été abandonnés. Les collecteurs de métaux et les gens voyant un profit potentiel dans le métal brillant protégeant ces sources s'y ajoutent, et c'est pourquoi elles gisent sans protection et dangereuses dans des secteurs que nous ne pouvons trouver."

Jusqu'ici, la coopération dans la découverte de générateurs abandonnés n'a pas été formalisée par quelque type d'accord que ce soit, comme l'un de ceux existant entre Moscou, les Etats-Unis et les agences internationales surveillant les sites de stockages d'armes nucléaires. Mais l'AIEA est devenue suffisamment inquiète pour faire de l'emplacement de ce qu'elle appelle des générateurs "orphelins" l'un de ses priorités.

Fleming relève que "pour l'heure, tout a été fait sur des bases ad hoc. L'AIEA a été l'institution la plus nettement impliquée dans l'identification et la récupération de sources. Ceci s'est produit à plusieurs autres reprises, récemment, en Géorgie et dans d'autres pays. Je pense que l'attention s'est maintenant accrue par le fait que ces sources peuvent également poser une menace terroriste, et c'est pour cette raison qu'a été approuvée la décision d'en faire l'une des nouvelles priorités de l'agence, à savoir contribuer à identifier, récupérer et stocker de manière sûre et adaptée ces sources abandonnées."


Contamination durable

Si par hypothèse des terroristes parvenaient à découvrir l'un des générateurs orphelins avant quiconque sur le territoire de l'ex-Union soviétique, comment leur serait-il possible d'en extraire du plutonium ou du strontium ? Fleming affirme que n'importe qui cherchant à extraire les substances radio-actives des objets devrait être bien entraîné et pourrait mettre sa santé en grand danger. Mais la tâche est faisable avec certaines connaissances.

"Ils devraient vraiment savoir ce qu'ils font. Les gens que l'AIEA a entraînés à récupérer les deux sources en Géorgie étaient des experts. Ils étaient entraînés pendant plus d'une semaine. Ils portaient des habits protecteurs, utilisaient un appareil manipulateur télécommandé, et ils ne restaient pas à proximité de la source pendant plus de 40 secondes. De sorte que quiconque désirant manipuler une telle source à des fins terroristes devrait également être désireux de sacrifier sa vie, ou certainement sa santé."

Mais pour quelqu'un possédant suffisament d'habileté et de motivation, le démontage réussi d'un seul générateur fournirait une moisson riche et létale. Arjun Makhijani précise que "même une très petite quantité de strontium-90 ou de plutonium-238 ont un affreux taux de radio-activité. L'un de ces générateurs a 40'000 curies de strontium-90, et la quantité de strontium-90 que vous devez avoir dans les poumons pour avoir une haute probabilité de cancer est inférieure à 2 millièmes de curie. Il y a environ 284 grammes de strontium-90 dans l'un d'entre eux, et la dose létale cancéreuse est d'environ 0.1 millième de gramme. Et les générateurs plus grands au plutonium-238 ont un potentiel dommageable comparable."

Ce qui rend si effrayant l'usage potentiel de strontium ou de plutonium radio-actif dans une bombe à dispersion, c'est qu'au contraire des agents biologiques comme l'anthrax, le nettoyage post-désastre n'est pour l'heure pas une option. Les effets subséquents hanteraient plusieurs générations. "La durée de vie moyenne du strontium-90 est 30 ans, de sorte qu'ils dureraient longtemps", poursuite Makhijani. "Et une fois qu'il a été dispersé efficacement, il serait impossible de procéder à un nettoyage, à la différence de l'anthrax où des moyens chimiques ont ainsi détruit les spores dans le bâtiment du Sénat US et permis sa réoccupation. Si des bâtiments sont irradiés, par exemple – parce que la radio-activité a été dispersée partout, dans des moyens de transport, des bus, des voitures, etc. – il serait impossible de les décontaminer. On parle ici de l'évacuation potentielle de vastes secteurs qui seraient devenus difficiles ou impossible à nettoyer, et les dommages économiques seraient plutôt énormes."

Pour l'heure, il n'y a aucune indication qu'un groupe terroriste ait essayé d'obtenir des générateurs radiothermiques hors service dans l'ancien territoire soviétique. Mais les indices découverts dans les redoutes d'Al-Qaeda en Afghanistan montrent que les terroristes, au moins théoriquement, ont envisagé l'option d'essayer la construction d'une "bombe sale."

Le New York Times, dans un article paru l'an dernier, a publié des extraits de ce qu'il a dit être un rapport irakien top secret sur l'essai par Bagdad d'une telle arme en 1987. Le journal a obtenu le rapport du Wisconsin Project on Nuclear Arms Control, une organisation privée de Washington qui dit avoir acquis le document auprès d'un fonctionnaire des Nations-Unies. David Albright, un ancien inspecteur nucléaire en Irak, a déclaré au New York Times qu'il avait vu le document et ne doutait pas de son authenticité. Selon le rapport de Bagdad, la tentative a échoué.

C'est à présent au gouvernement des Etats successeurs de l'URSS et à l'AIEA de rapidement localiser et rassembler toutes traces de générateurs sur leur territoire, afin d'assurer qu'aucune organisation ou nation n'ait l'occasion de mener des essais similaires.




Texte original: Jeremy Bransten, "Danger Of 'Dirty Bombs' Exacerbated By Old Soviet Generators", Radio Free Europe, 21.3.02    
Traduction: Cap Ludovic Monnerat
    







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