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Des fusils à louer pour le Congo, une proposition inédite faite à l'ONU

13 juillet 2003

Casque bleu au CongoU

n consortium de groupes de mercenaires a fait à l'ONU une proposition trompeusement simple : donnez-nous 200 millions de dollars, et nous allons vous aider à mettre un terme à la guerre au Congo.

Les milices tribales qui sévissent dans la partie orientale de cette nation d'Afrique centrale massacrent les villageois par centaines. Depuis 1998, les violences locales ont coûté au moins 3,3 millions de vies.

La réponse du monde a été pour le moins modeste. Quelques centaines de soldats de maintien de la paix ont été déployés par l'ONU depuis 2001. Mais ces braves âmes sont restées impuissantes, le mois dernier [c'est-à-dire le mois de mai, note du traducteur], lorsque les milices ont tué 430 innocents dans la capitale provinciale de Bunia.


«... Une idée plus sûre est de laisser les groupes militaires privés s'occuper du transport et de la logistique. Il pourrait être temps de leur donner une chance au Congo. »


Ces assassinats ont suscité la honte de l'Union Européenne, qui a décidé d'envoyer 1400 soldats surtout français et britanniques dans le secteur. Mais ils n'opèreront que dans la ville de Bunia – quelle que soit l'évolution des événements dans la campagne. Et le 1er septembre, les soldats rentreront chez eux. Fin de l'histoire.



Une proposition difficile à écarter

Que se passera-t-il ensuite ? Le Conseil de sécurité de l'ONU essaie actuellement de le décider. Une suggestion inhabituelle est venue de l'International Peace Operations Association (IPOA), une association de compagnies militaires privées. Celles-ci ne veulent pas s'interposer entre les armées qui guerroient. Mais pour 100 à 200 millions de dollars, cinq de ces sous-traitants pourraient former une force de réaction rapide pour combattre les viols de masse et les purifications ethniques des milices, entraîner une force de police locale, assurer la logistique d'opérations onusiennes dans la zone, et utiliser la surveillance aérienne pour avoir la région à l'œil.

"C'est un nouveau concept. Et certains aspects mériteraient d'être implémentés dès que possible", affirme Peter Singer, un chercheur de la Brookings Institution, auteur du livre récemment publié Corporate Warriors: The Rise of the Privatized Military Industry. "Mais la proposition doit être davantage étoffée avant d'être prise au sérieux. Quelle est la chaîne de commandement ? Qui décide du déploiement de cette force de réaction rapide ? Comment assurons-nous sa responsabilité, et comment pouvons-nous la rendre applicable avec la loi internationale ?"

Pour l'instant, le Conseil de sécurité de l'ONU ne se soucie même pas de considérer de telles questions, alors qu'il envisage sa prochaine décision au Congo. Il refuse même de parler à l'IPOA, relève son président Doug Brooks.

Mais il n'y a pas beaucoup d'autres options sur la table pour le Congo. "Je ne peux pas – et je ne connais personne qui le puisse – soutenir une solution militaire privée", souligne Peter Gantz, membre du Partnership for Effective Peace Operations, une coalition de groupes de réflexions et d'aide. "Mais elle est difficile à écarter, en l'absence de toute autre solution crédible. C'est même la seule chose qui pourrait être efficace."

Les firmes militaires privées ayant fait cette offre ont eu une histoire mitigée : des succès retentissants et des échecs affreux. En 1996, les rebelles libériens ont mis à sac la capitale Monrovia. ICI, basée dans l'Oregon et employant des vétérans de l'Armée rouge ainsi que d'anciens membres des forces spéciales US, ont contribué à y préserver l'ambassade américaine. Les consultants du champ de bataille employé par MPRI (Military Professionals Resources Inc.) ont aidé à transformer l'armée croate d'un "groupe de miliciens ivres" en une force capable "d'offensives interarmes de type OTAN", affirme Singer. Leur attaque a inversé le cours du conflit balkanique. Mais c'était "l'un des pires épisodes de 'purification ethnique', un événement qui a laissé plus de 100'000 réfugiés", selon le New York Times.

Airscan, une firme de surveillance aérienne basée en Floride, a gardé un œil sur les lancements spatiaux de la NASA. Mais en Colombie, des employés de la compagnie ont par erreur dit aux pilotes du gouvernements qu'un village était bourré de guérilleros des FARC. La zone a été bombardée. Cependant, aucun rebelle ne s'y trouvait, et 18 civils sont morts à la place.

Avec un bilan pareillement inégal, Singer doute qu'il est sage de donner à ces sociétés de fusils à louer l'autorité de presser la gâchette au Congo. Les compagnies précisent qu'elles comptent employer pour leur force de réaction rapide 475 à 1200 combattants Gurkhas venant du Népal et entraînés par les Britanniques – des types ayant la réputation d'être pour le moins rugueux. Mais on ignore qui commanderait les mercenaires. Et que se passe-t-il, demande Singer dans la dernière édition de Policy Review, si les intérêts privés et humanitaires se mettent à diverger ?

"La sécurité est maintenant à la merci de tout changement dans les coûts du marché et les incitations… Une société engagée pour établir une zone sécurisée pourrait ultérieurement trouver la situation plus difficile que prévu. L'opération pourrait devenir déficitaire ou, en raison de toute accroissement de l'opposition locale, plus dangereuse. La compagnie pourrait donc conclure qu'il est dans son intérêt de se retirer. Ou même si elle est immobilisée par les contraintes du marché, ses employés pourraient décider que les risques personnels qu'ils prennent en poursuivant une opération sont trop hauts pour leur salaire. Non liés par une loi militaire, ils pourraient simplement rompre leurs contrats sans craindre de punition et trouver un travail plus sûr et mieux payé ailleurs."

Une idée meilleure et plus sûre, croit Singer, est de laisser les groupes militaires privés s'occuper du transport et de la logistique. Depuis des années, des entrepreneurs comme ICI ont effectué ces tâches pour différentes armées autour du monde – y compris les Forces armées américaines. Il pourrait être temps, pense-t-il, de donner à ces firmes une chance au Congo.



Texte original: Noah Shachtman, "Hired Guns", Tech Central Station, 26.6.2003    
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat
    









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