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Israël est prêt à frapper de manière décisive
les installations nucléaires en Iran

7 septembre 2003

F-15I israélien chargé de bombesD

epuis des années, l’Etat d’Israël s’inquiète de l’avancement du programme nucléaire iranien. Il pourrait décider, malgré la pression qu’exerce la communauté internationale sur le régime de Téhéran, de déclencher une série de frappes aériennes.

Le brigadier-général A. est un petit homme à l’esprit vif, sans grande patience pour les journalistes en retard. En tant que commandant de l’une des bases aériennes essentielles d’Israël, il est également responsable d’assurer la capacité des Forces aériennes israéliennes (FAI) en matière de frappe stratégique à longue distance sur des cibles telles que, disons, l’Iran.

Il refuse d’être amené à identifier des missions spécifiques, et il préfère en rester à de vagues généralités. «Il y a des objectifs et nous devons fournir la capacité de les frapper», affirme le général. «Ils peuvent se trouver à des milliers de kilomètres. Nous avons construit une force robuste et nous avons la capacité de frapper.»


«... Les Forces aériennes israéliennes ont destiné le gros de leurs investissements durant la dernière décennie en vue d'une frappe sur les installations nucléaires et missilières de l'Iran. »


Notre entretien fut interrompu un instant lorsqu’un autre chasseur bimoteur F-15 décolla dans un sourd grondement en passant au-dessus du quartier-général pour une mission d’entraînement, dont certaines durent des heures afin de simuler des attaques à longue distance sur, disons, l’Iran – qui est distant de 1300 kilomètres.



Un programme nucléaire dévoilé

Jeudi 28 août, les FAI ont démontré pareille aptitude en faisant voler trois F-15 jusqu’en Pologne, à plus de 3000 kilomètres, où ils vont célébrer le 85e anniversaire des forces aériennes de ce pays. Lors de leur voyage de retour cette semaine, les avions de combat des FAI vont effectuer un passage au-dessus du camp de concentration d’Auschwitz.

Il ne serait pas exagéré de dire que les FAI ont destiné le gros de leurs investissements durant la dernière décennie en vue d'une frappe sur les installations nucléaires et missilières de l’Iran. Les généraux et les dirigeants israéliens ont ouvertement déclaré que les dizaines de milliards de shekels dépensés doivent accroître leur allonge pour cette seule éventualité.

En tant que régime extrémiste islamique qui a publiquement juré de détruire l’Etat juif, l’Iran a l’intention de développer la bombe. Mettre un terme à cela est un défi de taille pour l’establishment militaire israélien.

Le 8 septembre, l’Iran sera au centre d’une réunion à Vienne du conseil des gouverneurs de l’Agence Internationale pour l’Energie Atomique (AIEA), où son Président Mohammed El-Baradei devrait châtier l’Iran pour sa duplicité nucléaire.

Après des années d’efforts tranquilles, les responsables israéliens sont certains que le monde a finalement pris conscience de la menace nucléaire iranienne. Les diplomates à Jérusalem espèrent que les violations constantes des accords par l’Iran vont lui valoir une réprimande au Conseil de sécurité des Nations Unies, ou au moins amèneront davantage de supervision. Ceci perturberait son projet d’enrichir de l’uranium et d’acquérir du plutonium, tous deux nécessaires à la production d’armes nucléaires.

«Nous pensons que le déclic s’est produit», souligne un responsable israélien proche du dossier. «La pression sur l’Iran augmente, parce que de plus en plus de pays ne sont pas prêts à accepter un Iran nucléaire.»

Ce changement s’est produit voici une année environ, lorsque des dissidents iraniens ont révélé que Téhéran avait secrètement construit deux installations, une usine à eau lourde et une centrifugeuse, ridiculisant ainsi les proclamations de l’Iran selon lesquelles il ne voulait que bâtir des centrales nucléaires.

Dans un tel scénario, Israël pourrait finalement adopter un profil bas en suivant ce sujet. Mais selon un article du Washington Post, Sharon aurait déclaré à Bush, durant sa dernière visite à la Maison Blanche, que l’Iran était plus près de la production d’armes nucléaires que les estimations des services de renseignements US ne l’affirmaient, et qu’Israël considérait sérieusement une frappe préemptive.

En réaction à cette annonce la semaine dernière, le porte-parole du Ministère iranien des Affaires étrangères, Hamid-Reza Assefi, a mis en garde Israël contre toute attaque militaire sur ses sites nucléaires. «J’espère que le régime sioniste ne va pas commettre un acte aventureux», a dit Assefi, ajoutant que le cas échéant Israël paierait un prix très lourd.



Frappes israéliennes à longue distance

Israël a été le premier à tirer la sonnette d’alarme au sujet des intentions nucléaires de l’Iran, et a donné ces dernières années des indices selon lesquels il pourrait frapper les installations nucléaires iraniennes à Bushehr et ailleurs, tout comme il frappé de la réacteur irakien à Osirak en juin 1981.

Israël n’a pas agi ouvertement contre l’Irak jusqu’à ce que ce dernier ne soit qu’à quelques semaines de développer une arme nucléaire. L’Iran n’a même pas approché ce stade. Il n’a pas encore atteint le point de non retour – la capacité à enrichir suffisamment d’uranium de manière indépendante.

«Nous pensons que l’été prochain, si l’Iran n’est pas stoppé, il atteindra l’autosuffisance – et donc le point de non retour. Après cette capacité propre, il lui faudra environ 2 ans pour fabriquer une bombe nucléaire», a annoncé voici 2 semaines sur la TV Channel 1 le chef du renseignement militaire, le major-général Aharon Ze’evi. Interrogé au sujet d’annonces parlant d’une attaque préemptive, Ze’evi a répondu : «je ne pense pas qu’il est judicieux de parler de capacités militaires dans ce studio TV.»

Bien que non publiée officiellement, la doctrine stratégique transformée des Forces de défense israéliennes (FDI) privilégie le besoin d’empêcher les armes de destruction massive d’atterrir dans les mains des ennemis d’Israël. Ce qui a été fréquemment rendu public, ce sont les déclarations des FDI selon lesquelles les 25 F-15I opérationnels depuis 1999 et les 100 F-16I, dont le premier est prévu pour arriver en décembre, ont été achetés avant tout pour contrer la menace iranienne.

Selon la publication de Londres Jane’s Intelligence Review, Israël «va presque certainement lancer une attaque préemptive contre l’infrastructure de recherche et développement ABC iranienne avant qu’elle ne puisse produire des missiles balistiques équipés d’ogives nucléaires.»

«Est-ce que les FAI peuvent lancer une frappe préemptive sur l’Iran ? La réponse est oui», déclare le brigadier-général (en retraite) Giora Rom, ancien cadre supérieur des FAI. «Mais c’est une mission très compliquée qui exige une énorme planification.»

Rom a eu une expérience de première main en la matière lorsqu’il a planifié la frappe spectaculaire de 2060 kilomètres sur le quartier-général de l’Organisation de Libération de la Palestine, à Tunis en octobre 1985. Ce raid, mené en représailles au meurtre de trois Israéliens sur un yacht à Chypre, figure toujours dans les registres des FAI comme l’attaque la plus lointaine à partir du territoire national.

«Les FAI ont investi dans l’augmentation de leur allonge. Une attaque d’une telle portée impliquerait très certainement un ravitaillement en vol à mi-parcours. Mais vous devez vous rappeler que l’espace aérien au-dessus de l’Irak a maintenant changé. Je ne peux pas dire si c’est en mieux ou en pire», souligne Rom, aujourd’hui directeur de l’Agence Juive.



Dispersion des cibles iraniennes

L’ancien Ministre de la Défense Moshé Arens estime que l’Iran a tiré les leçons de l’attaque sur Osirak et a dispersé ses installations à travers le pays. «Nous avons la capacité d’atteindre l’Iran, mais on ne peut attendre d’une frappe unique qu’elle puisse stopper le programme iranien», dit Arens, qui était en fonction lorsque la décision a été prise d’acheter les chasseurs-bombardiers à longue portée F-16I.

Arens écarte les annonces d’une frappe préemptive israélienne «à ce stade de la partie», en maintenant qu’Israël devrait à cet instant se retrancher derrière les efforts diplomatiques. Mais comme il le souligne, une frappe unique ne parviendrait pas à accomplir une telle mission. Si Israël avait vraiment la volonté de mettre un terme au programme nucléaire de l’Iran, une attaque prolongée sur de multiples cibles dans tout cet immense pays serait nécessaire.

Ce qui inclut bien entendu le réacteur de Bushehr, un site vulnérable, fixe et hautement visible sur la côte sud exposée de l’Iran. Durant la guerre Iran-Irak de 1980 à 1988, les réacteurs jumeaux ont été pris pour cibles de manière répétée par Irak, qui a bombardé six fois la centrale. Ces attaques ont détruit toute la zone centrale des deux réacteurs.

Une autre cible potentielle serait l’usine d’eau lourde secrète près d’Arak, qui est nécessaire à la production de plutonium. Une troisième cible serait probablement la grande centrifugeuse à gaz de Natanz, à environ 100 kilomètres au nord d’Ispahan, sur la vieille autoroute Natanza-Kashan. Le renseignement militaire israélien appelle le site «Kashan», et il est paraît-il enterré sous plusieurs couches de béton armé.

Un autre objectif serait peut-être l’Aciérie Nationale Iranienne à Ispahan, puisqu’elle est susceptible de fournir un certain nombre de produits métallurgiques liés au nucléaire. Mais une autre cible principale pourrait être le site de conversion d’hexafluoride d’uranium (UF6) au Centre de Recherche Nucléaire de Rudan, près de Shiraz.

Selon l’analyste militaire Michael Knights, les cibles sont nombreuses et le secret du succès est d’identifier les plus difficiles à remplacer. «Des attaques sur des nœuds essentiels retarderaient le développement d’armes nucléaires iraniennes d’au moins quelques années», affirme Knights, un chercheur en défense à l’Institut de Washington pour la Politique du Proche-Orient.

Frapper les centrifugeuses serait plus tactique que stratégique, car les Iraniens pourraient les réparer et les remettre en marche ailleurs assez rapidement. «Pour Israël, la cible la plus commode serait le réacteur de Bushehr. Il est au-dessus du sol et relativement vulnérable, car il est situé juste sur la côte. Les forces aériennes ne devraient pas trop pénétrer l’espace aérien iranien», déclare Knights.

«L’installation d’eau lourde d’Arak et celle d’UF6 sont également accessibles, mais elles sont plus proches du centre de l’Iran. Bien que les défenses aériennes ont de nombreux vides en raison des montagnes, ce serait une mission très difficile. Une frappe sans lendemain serait plutôt inutile pour Israël. Imposer un retard de quelques années est le mieux qu’il puisse espérer, et le contrecoup entraînerait bien des remous dans la région ainsi qu’avec les Etats-Unis», souligne Knights. «Sans même parler des réponses directes ou indirectes de l’Iran.»



Les possibilités israéliennes

Des personnages familiers avec les opérations aériennes affirment que si Israël lance une frappe préemptive unique, elle passerait très probablement par une route contournant la Jordanie par le sud – au-dessus des déserts saoudiens – puis débouchant sur le Golfe Persique. Ce qui exigerait au moins deux ravitaillements en vol. Mais si une attaque soutenue était choisie, il y aurait aussi l’option d’utiliser un corridor à travers l’espace aérien jordanien, voire même syrien ou irakien – tout en empêchant des missiles sol-air ou des chasseurs ennemis d’engager d’autres éléments des forces aériennes.

Bien entendu, Israël préférerait frapper à partir d’un point de départ situé à l’intérieur de l’espace aérien ami de la Turquie, mais cela nécessite également une grande dextérité diplomatique. De plus, comme la plupart des cibles se trouvent au sud et au centre de l’Iran, une frappe aérienne israélienne à partir du sol turc aurait besoin de voler exactement au-dessus de la ligne de front des défenses aériennes iraniennes.

«Il faut se frayer un passage», souligne Michael Knights, qui suggère une route alternative à partir de la côte érythréenne à même de supprimer 1000 kilomètres de la distance que les chasseurs-bombardiers devraient franchir. Ils voleraient au-dessus d’Oman et du Yémen, qui ont tous deux de faibles défenses aériennes, et «dont aucun n’a de raison de partager des renseignements avec l’Iran.»

L’un des principaux défis pour une telle frappe aérienne n’est pas la distance, mais la capacité à maintenir le contact avec les bases en Israël. L’Iran n’est pas dans l’arrière-cour, où des jets pourraient atteindre le front en quelques minutes. Le groupe de bombardement devrait par conséquent être autonome.

Giora Rom affirme que l’un des scénarios à prendre en considération est le besoin de secourir l’équipage d’un appareil endommagé. Il n’a pas détaillé la manière avec laquelle cela pourrait être fait. Mais Jane’s Intelligence Review suggère qu’Israël déploierait probablement un groupe de forces naval dans la Mer d’Arabie à cet effet, avec un navire marchand reconverti servant de porte-hélicoptères et une escorte de corvettes Saar 5.

Selon la même source, les FAI peuvent mener chaque jour plus de 300 sorties d’attaque et d’escorte à très longue portée, appuyées par des avions de guerre électronique, de renseignement électronique, de ravitaillement ainsi que des systèmes aériens d’alerte et contrôle, tout en maintenant une forte réserve contre toute intervention des Etats arabes. Chaque mission d’attaque pourrait comporter l’engagement de missiles Popeye [d'une portée de 75 km, note du traducteur], de bombes à guidage laser ou électro-optique, avec une protection supplémentaire fournie par des leurres Samson.

Malgré la puissance des défenses aériennes, les cibles statiques iraniennes sont pour l’essentiel impossibles à défendre contre des armes de précision larguées à distance. Le F-15I tant vanté peut également transporter, d’après certaines sources, un missile de croisière à longue portée, relativement furtif et à propulsion ramjet. Le rayon d’action standard du F-15I s’élève à 1450 kilomètres, ce qui lui permet d’atteindre n’importe quel point du Moyen-Orient et de revenir sans ravitaillement. Mais les capacités de ravitaillement en vol lui donnent dans ce contexte un rayon d’action de 4000 kilomètres.

En l’état actuel des choses, seuls les 25 F-15I basés dans le Néguev sont capables de frapper l’Iran par une opération directe. Les chasseurs F-16 de tous types (A, B, C et D) devraient tous être ravitaillés – les F-16 qui avaient bombardé le réacteur irakien en 1981 n’avaient pas été ravitaillés et ont regagné la base avec leurs dernières gouttes de carburant. Mais en décembre, le premier des 100 F-16I qu’Israël a achetés pour la somme astronomique de 4,5 milliards de dollars devrait être livré.

Ces F-16 améliorés auront des réservoirs orthomorphiques qui augmenteront leur portée et l’amenant à celle du F-15I, ce qui leur permettra d’atteindre l’Iran et de revenir sans ravitaillement. Selon des sources militaires, toutefois, il faudra au moins une année pour que le premier escadron de ces chasseurs-bombardiers devienne opérationnel.



Texte original: Arieh O'Sullivan, "Strike while the ions are hot", Jerusalem Post, 28.8.2003  
Traduction et réécriture: Maj EMG Ludovic Monnerat
  









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